La civilisation de la vallée de l’Indus ou civilisation harappéenne (vers 2500 – 1800 av. JC) qui remonte au début de l’histoire de l’Asie du Sud est une civilisation de l’âge de bronze. Les vestiges de cette culture se trouvent dans la moyenne vallée de l’Indus, sur les berges de la Mer d’Oman. Cette civilisation s’organise autour des villes telles que Mohenjo-Daro (200ha), Harappa (150ha) et Dholavira (80ha) (1).Découverte dans les années 1872 par Alexander Cunningham (directeur général de l’Acheological Survey of India) il faudra attendre 1920 pour que John Marshall (directeur de l’Acheological Survey of India) affirme l’existence de cette civilisation qui se classe comme l’une des premières civilisations de l’histoire avec celles de Mésopotamie et d’Egypte antique. La culture harappéenne serait basée sur la culture de la terre, l’élevage, la pêche et la chasse. Des découvertes archéologiques nous permettent de penser que le commerce maritime entre les civilisations indus et celle du golfe Arabique et de Mésopotamie existaient déjà. Cette civilisation reste cependant très peu connue au vu de l’incapacité des archéologues à déchiffrer leur écriture.

La ville Harappéenne : complexité urbanistique
D’après les découvertes archéologiques, l’urbanisation de la civilisation harappéenne était basée autour la ville et centrée sur l’Indus.
La ville était divisée en 2 parties :
- La « citadelle » bâtie en hauteur de la ville, regroupait le réservoir d’eau, des puits, des zones de stockage alimentaire pour faire sécher les grains , des lieux de vie publique et était entourée de remparts avec des plateformes en briques surélevés d’une dizaine de mètres pour protéger les points d’eau et les habitants.
- Le reste de la ville était composé d’une voirie orthonormée(2) et composée de rues et de ruelles se regroupant en angle droit pour former des blocs où les habitations sont regroupées.
Cet urbanisme est étudié depuis sa découverte pour essayer de comprendre sa complexité inégalable pour l’ époque. Les archéologues nomment cette cité « le Manhattan de l’âge de bronze ». Cette complexité suggère une maîtrise de la planification urbaine complétée des premiers systèmes d’assainissement au monde.

blocs d’habitation – Mohenjo-daro
Le plan des villes indique un réseau rigoureux de rues et d’habitations. Les artères entre les rues et les ruelles formaient des blocs d’habitation. La plupart des habitations en briques crues sont composées d’une véranda, d’une cour, d’un puits et d’un point d’eau (présumé être l’emplacement de la salle de bain car des revêtements en carreaux de céramique y ont été retrouvés) relié à un système d’évacuation des eaux usées, techniquement très ingénieux. Les pièces des habitations pouvaient mesurer de 3 à 30m2 avec une épaisseur de mur de 0,7m à 1,5m suivant les matériaux de construction.
Pour comprendre les dispositions urbanistiques de cette civilisation, Anna Sarcina s’est appuyée « sur l’examen des différences de superficies et d’orientations de l’habitat pour établir une typologie de la plupart des habitations à Mohenjo-daro.
Ainsi distingue-t-elle :
- les maisons dotées d’une cour au nord et de pièces sur les trois autres côtés ;
- les maisons avec une cour d’angle et des pièces disposées des deux côtés;
- les demeures à cour centrale, qui se trouvent être les plus grandes et donnent souvent sur rue, comportant une cour, des pièces sur les quatre côtés et quelque fois un puits;
- Et enfin, des maisons possédant une cour démesurément vaste (plus de la moitié de la superficie globale).
Selon A. Sarcina, les constructions dotées d’un puits devaient être principalement des ateliers d’artisans ou des bâtiments publics et, dans certains cas, le type 3 ne servait pas d’habitation mais, comme d’autres maisons exceptionnelles, dotées de deux cours, correspondaient peut-être à des centres de production artisanale ou à la résidence de plusieurs familles » (3)
Les villes ne comportaient pas de signes de richesse ou de religion tels que des temples ou des palais. La ville n’était pas construite tournée vers un point central que l’on pourrait qualifier de point de gouvernance. La question de gouvernance reste floue pour les chercheurs du fait d’être dans l’incapacité de pouvoir déchiffrer leur écriture. Les recherches n’ont pas mis en évidence de grands monuments toutefois les villes ont toutes un point commun: les grands bains . Ces constructions disposaient de deux parties : un grand bain et d’une piscine , disposant chacune d’un dispositif servant à remplir et vider l’eau.

Le premier système d’assainissement de l’histoire :
La civilisation de la vallée de l’indus disposait d’un système d’évacuation des eaux usées et d’assainissement remarquables. Les plans des réseaux indiquent un caractère indépendant de leur civilisation. Chaque habitation détenait son propre réseau horizontal et vertical pour récupérer ou évacuer l’eau usagée, la plupart d’entre elles avaient aussi accès à un puits. Les « canalisations » passaient sous les rues, elles étaient recouvertes de dalles de pierre et d’argile et reliaient les habitations entre elles par un système collectif.
Les greniers à blé de la civilisation de la vallée de l’Indus : Une architecture pensée
Des ruines de 51,5m x 41m ont été retrouvées et assimilées à de grands greniers à grains à Harappa. Juxtaposé à cette construction, on trouve un habitat servant à loger les ouvriers et les esclaves qui travaillaient dans les champs de blé. Les fondations de celles-ci sont composées de briques et de bois pour maintenir au mieux la structure. Pour optimiser l’exploitation de cette culture, les greniers ont été construits près des berges pour faciliter les modes de transports.
Des questions restent sans réponses :
La civilisation de la vallée de l’indus impressionne par son expertise en matière d’aménagement et d’urbanisme. Les recherches archéologiques ont permis de répondre à un grand nombre de questions concernant cette civilisation: son économie, son urbanisme, son artisanat, ses commerces …
Toutefois, le fait de ne pas pouvoir déchiffrer son écriture implique que plusieurs aspects de cette civilisation restent spéculatifs. Les aspects de religion, de gouvernance et d’organisation sociale restent un questionnement.
Alexia Mas
(1) Michel Angot « L’inde » Avant les empires. pages 43-45,Presses Universitaires de France, 2012
(2) Shereen Ratnager « le citadin et les liens tribaux a Mohenjo-daro. Habitat, parenté, voisinage » Editions de l’EHESS, 2004/1 59e année. Pages 39 à 71.
(3) ANNA SARCINA, « A statistical assessment of house patterns at Mohenjo-daro », Mesopotamia, XIII/XIV, 1978-1979, pp. 155-199.
Références :
- Lewis Mumford « La cité à travers l’histoire » III — Formes et modèles antiques, pages 67 à 115, 2011
- Michel Angot « L’inde » Avant les empires. pages 43-45,Presses Universitaires de France, 2012
- Michel Boivin « Histoire de l’Inde »L’Inde ancienne, pages 7 à 32, 2015
- Shereen Ratnager « le citadin et les liens tribaux a Mohenjo-daro. Habitat, parenté, voisinage » Editions de l’EHESS, 2004/1 59e année. Pages 39 à 71.
- Hisour.com « Urbanisme »
- Yvesh »la mystérieuse civilisation de l’indus », Article 2012, Sciences-faits-histoires.com