La médina de Fès, entre tradition et modernité

Pour beaucoup, parler d’urbanisme pour définir la médina de Fès est quelque chose d’anachronique. En effet, la construction de la médina de Fès, aussi appelé Fès el-Bali, commença dès l’an 789 alors que le terme d’urbanisme n’arrive que bien plus tard. Ainsi, on ne peut parler d’urbanisme au sens moderne. D’ailleurs la majorité des règles qui régissent la construction de la médina ne sont pas écrites ; tout s’est construit sur la pratique ! Les constructions en dédales laissent apparaitre plus d’impasses que de ruelles dans lesquels les corps de métiers viennent s’installer pour développer leurs savoir-faire. Sur les 90 km de ruelles qui constituent la ville, aucune voiture n’a le droit de circuler. Ce lieux clos à préserver une douzaine de siècles de traditions et s’est enrichie des différentes cultures et des différentes caractéristique artistiques des civilisations qui s’y installèrent. Elle a cela de particulier qu’elle est entièrement close d’une muraille fortifiée ; elle est la plus grande et la plus aboutie. 

L’architecture de la médina de Fès rappelle ses origines Andalouses. En effet, Lorsque Isabelle la Catholique expulse les musulmans en 1502, une grande partie viennent s’installer au Maroc et apportent avec eux les savoir-faire et les arts qui se refléteront dans la construction de la médina. À ce propos, Mohamed Metalsi, urbaniste et historien d’art dira « Fès à la finesse de certains monuments de Séville ». 

Le principe même de médina redéfinit le concept d’espace public et d’espace privée. En effet, dans cette médina, l’espace public perd toute son importance. Ce qui compte c’est l’espace privée, les relations familiales, les rencontres de voisinages… D’ailleurs, point d’ornement ou de façade décorées. Ici, l’architecture n’est pas exhibée mais elle est réservée pour l’intérieur de la maison. Les jardins sont clos, la richesse est cachée ; on se retrouve en privée. 

Le terme qualifiant le mieux la médina est celui de mixité. On y découvre une mixité fonctionnelle puisque toutes les activités s’y développent (les fonctions résidentielles, économiques, sociales et culturelles se juxtaposent) mais également une mixité sociale puisque les classes les plus pauvres vivent aux côtés des classes les plus aisées, ainsi qu’une mixité générationnelle (où les plus jeunes vivent avec les plus vieux).

Toutes ces caractéristiques nous éclairent sur la citation de Marc Gossé dans son ouvrage La Médina, modèle urbain pour le XXIe siècle ? en 2011. Il écrit « La médina telle qu’élaborée par la tradition arabo-musulmane peut en effet constituer un modèle d’urbanisation contemporain ». Ainsi, le modèle de la médina relève-t-il de l’urbanisme traditionnel, ou au contraire, représente-t-il un urbanisme du futur ?  A l’origine le terme de Medina est simplement utilisé pour désigner « la ville » en arabe, il désigne donc l’urbain dans son ensemble. Toutefois, au fil des siècles de nouvelles villes se développent autour des médinas et une distinction s’impose presque ‘naturellement’ donnant au terme de « médina » la connotation de ville « ancienne » ou « traditionnelle ». Aussi, on peut lire dans cette distinction de ville ancienne, ville nouvelle le reflet d’une société divisée ; d’un côté une population inscrite dans le passé, de l’autre une société qui se projettent dans le futur.  Alors comment une ville si ancienne – datant du IXe siècle – peut-elle sembler si actuelle ? 

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