Au sein de Plaine Commune, en particulier au sein de la ville de Saint-Denis, une grande partie de l’attention des habitants, des médias et des politiques se focalise sur les conséquences des projets urbains de grande ampleur sur le territoire, dans le contexte des Jeux Olympiques 2024 et du renouvellement urbain de la ville. En effet, celle-ci est aujourd’hui le lieu de nombreuses Zones d’Aménagement Concerté (ZAC) pour rénover le quartier de la Basilique, le quartier de la Gare Confluence ou encore le quartier Pleyel…

Cependant, même s’ils semblent moins médiatisés que les grands projets, le centre-ville de Saint-Denis est également le théâtre de deux Programmes Nationaux de Requalification des Quartiers Anciens Dégradés (PNRQAD) depuis 2010, qui ont autant d’incidence et d’importance pour les habitants que ceux-ci, voire davantage. Ces programmes ont été mis en œuvre suite à la signature de conventions entre la Commune de Saint-Denis, la Communauté d’Agglomération Plaine Commune et un certain nombre d’acteurs publics : l’Etat, l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine (ANRU), l’Agence de l’Habitat (ANAH), la Caisse des Dépôts et Consignations et Action Logement. Ils concernent deux sites stratégiques du centre-ville de Saint-Denis : d’une part, le renouvellement urbain de l’Îlot Brise Echalas, et d’autre part, le traitement de la mixité sociale d’un îlot bordurette au sein de l’Ilot Résistance – Porte de Paris. Ces deux PNRQAD prévoient la destruction de 230 logements au profit de la reconstruction de 320 autres (220 pour le parc privé et 110 pour le parc social). Ce sont avant tout des outils de restructuration lourde de rénovation urbaine dans le traitement de l’habitat dégradé, qui entendent répondre à quatre enjeux principaux et présents sur le territoire de Saint-Denis.
La plaie commune : la lutte contre l’habitat indigne
Le premier objectif des deux PNRQAD est de lutter contre l’habitat indigne au sein du parc privé du centre-ville de Saint-Denis. En effet, cette dernière est la troisième ville la plus peuplée d’Ile-de-France avec plus de 120 000 habitants, mais également l’une des communes de France les plus touchées par le problème de l’habitat indigne, avec un taux de près de 20% du parc privé. Plusieurs phénomènes, en particulier la proximité de Saint-Denis vis-à-vis de Paris et son accueil d’une population précaire, pauvre et immigrée voire sans papiers, alimentent ce problème au sein d’immeubles anciens et de copropriétés dégradées. La lutte contre l’habitat indigne passe par la lutte contre la dégradation des copropriétés qui se caractérisent à l’heure actuelle par une « surreprésentation et suroccupation des petits logements », une « surreprésentation des locataires dans le parc privé », ainsi qu’un « nombre élevé de sociétés civiles immobilières (SCI) propriétaires de logement et peu soucieuses de l’entretien du bâti ». Dans la mesure où les PNRQAD sont des programmes de grande ampleur, la priorité est donc donnée aux syndicats de copropriété plutôt aux propriétaires individuels.
L’enjeu controversé : le maintien d’une mixité sociale
Le second objectif des deux PNRQAD est d’assurer ou de maintenir une mixité sociale au sein du centre-ville de Saint-Denis, mais il est également le plus controversé. En effet, Saint-Denis est une ville historique de la ceinture rouge de Paris qui accueille une population modeste au sein du parc social ou d’un parc privé à bas coûts. Dans le cadre d’un projet de peuplement, les PNRQAD ont pour but de diversifier l’offre de logements et d’attirer de nouveaux habitants issus des classes moyennes pour lutter contre la paupérisation des quartiers, en particulier du centre-ville. Or cette stratégie a des conséquences sur le peuplement de ces derniers et crée un risque de reconquête sociale, de gentrification et de ségrégation. Dans le même temps, les PNRQAD essayent de maintenir les classes populaires, mais la part du parc social a baissé de plus de 40% à moins de 35% au profit de celle du parc privé. Une partie d’entre elle est donc écartée de la rénovation urbaine des quartiers. Même si la population continue d’y vivre, elle réside dans de moins bonnes conditions au sein du parc privé.
La mixité fonctionnelle
Le troisième objectif des deux PNRQAD est d’instaurer une mixité fonctionnelle au sein du centre-ville de Saint-Denis, et il est également le moins controversé. Comme dans de nombreuses villes en France, l’enjeu est ici de trouver un juste équilibre entre le commerce, l’habitat et le service. Il s’agit de générer la démolition et la construction, ainsi que la réhabilitation de logements, mais également la livraison de commerces au sein des deux PNRQAD.
L’identité bâtie en centre-ville
Le quatrième objectif des deux PNRQAD est de préserver l’identité bâtie au sein du centre-ville de Saint-Denis. En effet, l’Îlot Brise Echalas et l’îlot bordurette au sein de l’Ilot Résistance – Porte de Paris constituent deux sites stratégiques du centre-ville de Saint-Denis car ils se situent en entrée de ville et à proximité de deux opérations d’aménagement Confluence et Porte de Paris. Il convient d’éviter un décrochage du centre-ville par rapport aux projets urbains en cours, qui risquerait d’ailleurs d’impacter ces derniers. L’enjeu est ici d’améliorer ou de revaloriser l’image des quartiers grâce à la rénovation urbaine. Toutefois, au même titre que a mixité sociale, il peut arriver de procéder à l’expropriation et à la démolition que des bâtiments les plus dégradés, mais il semble primordial de conserver l’ambiance et l’identité des quartiers cosmopolites et populaires de Saint-Denis.
A titre de conclusion, la ville de Saint-Denis, et en général le territoire de Plaine Commune, est en proie à des enjeux de requalification des quartiers anciens dégradés. Même si les projets urbains de grande ampleur ont des conséquences sur le renouvellement urbain de la ville, des Programmes Nationaux de Requalification des Quartiers Anciens Dégradés (PNRQAD) jouent également un rôle majeur depuis 2010 et permettent de lutter contre une plaie commune : l’habitat indigne. Dès lors, ils méritent au même titre une médiatisation au même titre que ceux-ci.